Formation et formation continue

Dans le domaine de l’éducation (formation et formation continue), l’égalité des personnes handicapées échoue fréquemment parce que les prestations ne sont pas accessibles : les cours ne sont pas compréhensibles pour des personnes déficientes auditives, les bâtiments ne sont pas accessibles aux personnes en fauteuil roulant ou encore il n’est pas prévu que les personnes présentant des difficultés d’apprentissage puissent passer les examens de manière adaptée à leur handicap. C’est pourquoi la Loi sur l’égalité pour les personnes handicapées stipule que les prestations de formation et de formation continue doivent être accessibles aux personnes handicapées sans les désavantager, même si le degré d’accessibilité peut différer d’un prestataire à l’autre. La loi s’applique par principe à toutes les prestations de formation et de formation continue, de l’école primaire à la formation continue, en passant par tous les échelons intermédiaires : degré secondaire, formation professionnelle, universités, etc. Les examens et la formation dispensée (enseignement, durée de la formation, etc.) doivent être adaptés aux besoins des personnes handicapées, compte tenu du principe de proportionnalité.


    Différences entre prestataires de formation publics et privés

    Les personnes handicapées ont un droit subjectif à ce que les examens et les prestations de formation des institutions de formation publiques de la Confédération, des cantons et des communes soient adaptés à leurs besoins, dans le respect du principe de proportionnalité, et ce à tous les niveaux de formation. Si une personne handicapée subit une inégalité de la part d’une collectivité publique dans le domaine de la formation ou de la formation continue, elle peut demander au tribunal ou aux autorités administratives que la collectivité publique élimine l’inégalité ou qu’elle s’en abstienne.

    Sauf au niveau de l’école primaire, les institutions de formation privées sont tenues dans une mesure nettement plus faible d’empêcher les inégalités envers les personnes handicapées. Ainsi, les prestataires privés ne peuvent être obligés d’adapter leurs prestations aux besoins des personnes handicapées.

    Adaptation des prestations de formation et des examens

    Les adaptations formelles constituent la « compensation des inégalités » et sont destinées à compenser les désavantages qui résultent du handicap. Il s’agit ici essentiellement de la possibilité de pouvoir utiliser des moyens auxiliaires spécifiques pendant l’enseignement ou les examens ou encore de recourir à une assistance quand cette aide est nécessaire.

    Par conséquent, la prestation de formation et les examens doivent être adaptés sous tous les aspects aux besoins spécifiques de la personne, compte tenu du principe de proportionnalité. Cette façon de procéder a pour but de rétablir l’égalité des chances dans le domaine de la formation. Lors du choix des adaptations, il faut toujours garder à l’esprit le fait que le but de celles-ci est de compenser le désavantage résultant du handicap, sans que résulte un avantage par rapport aux autres élèves ou étudiants. Par principe, la règle qui s’applique est que la compensation de l’inégalité s’arrête lorsque la compensation empêcherait de vérifier des aptitudes ayant une portée centrale. Il faut clarifier dans chaque cas ce que cette règle signifie concrètement, en fonction de la discipline, du niveau et du but de la formation. Si des mesures sont accordées à titre d’adaptations formelles, il n’est pas permis de les faire figurer dans le bulletin scolaire, le relevé des notes ou le certificat.

    Exemple

    Lors d’un accident d’automobile, Monsieur M. a subi un grave traumatisme cranio-cérébral. Lorsque sa réadaptation sera terminée, il souhaiterait reprendre ses études d’histoire. Du fait des lésions cérébrales laissées par l’accident, Monsieur M. se fatigue vite et a des problèmes de concentration. Les examens lui causent des difficultés, car, à cause de son handicap, il a besoin de plus de temps pour formuler ses réponses. Monsieur M. a demandé à son université que les cours et les examens soient adaptés. Il pourra donc passer les examens en disposant de plus de temps et de davantage de pauses ou de pauses plus longues. Il pourra aussi utiliser un ordinateur pour les épreuves écrites, car il écrit plus facilement avec un clavier qu’à la main. Les professeurs enverront leurs documents à Monsieur M. avant les cours afin qu’il puisse mieux se préparer.

    Dans le cas des adaptations matérielles, il ne s’agit pas de compenser des désavantages. En effet, les adaptations matérielles consistent à aménager les exigences quant aux contenus d’une discipline et à les réduire en fonction des aptitudes de la personne handicapée. Par conséquent, dans de tels cas, le candidat ne peut plus remplir intégralement les exigences de l’examen ou de la discipline. C’est pourquoi on ne peut plus parler ici de compensation des désavantages.

    Du point de vue juridique, les adaptations matérielles sont une mesure qui privilégie celui qui en bénéficie. Elles doivent donc reposer sur une base légale et ne sont admissibles que dans le cadre donné par le principe de proportionnalité. De plus, les personnes défavorisées par ces mesures (c’est-à-dire les personnes non-handicapées) ne doivent pas être désavantagées de manière inacceptable. Les mesures d’adaptation matérielle doivent figurer dans le bulletin scolaire, le relevé des notes ou le certificat. Comme une telle information peut influer négativement sur le parcours des personnes handicapées, il est recommandé de procéder à des adaptations matérielles uniquement lorsque les désavantages dus au handicap ne peuvent plus être compensés par des mesures formelles.

    Exemple

    L’élève S. a un léger déficit auditif. Dans la discipline « français », ce handicap fait qu’elle ne comprend pratiquement rien aux dictées et a donc toujours de très mauvaises notes. Son enseignante propose donc aux parents de dispenser leur fille des dictées et de ne pas évaluer la compétence « compréhension orale ». Jusqu’à ce jour, aucune tentative n’a malheureusement été entreprise pour compenser les désavantages dus au handicap au moyen de mesures formelles, par ex. en faisant asseoir l’élève tout près de l’enseignante, en veillant à ce que celle-ci parle très distinctement ou en prévoyant pour l’élève la possibilité de réentendre le texte de la dictée. Il faudrait appliquer des mesures de ce genre avant de renoncer à évaluer certaines prestations scolaires. Sinon, cette adaptation matérielle peut avoir des conséquences négatives sur le parcours de l’élève S.

    Les mesures destinées à compenser les désavantages sont aussi variées que les personnes handicapées sont différentes l’une de l’autre. Il n’existe pas de liste exhaustive de ces mesures, chacune devant être adaptée individuellement aux besoins de la personne concernée.

    Sont notamment reconnues à titre de mesures formelles admissibles de compensation des désavantages : prolongation de la durée de l’examen ; pauses plus fréquentes ou plus longues ; examens mieux structurés ou fragmentés ; changement du mode d’examen, oral au lieu d’écrit ou vice-versa ; examen théorique au lieu d’examen pratique ou vice-versa ; recours à des assistants, interprètes ou preneurs de notes ; adaptation du local ou du mobilier de travail ; utilisation d’un ordinateur ; adaptation des documents de cours ou d’examen ; utilisation de moyens auxiliaires.

    Sont considérées comme adaptations matérielles toutes les mesures qui abaissent les exigences quant au contenu de l’enseignement ou des examens, à savoir dispense totale ou partielle de certaines disciplines ou renonciation à évaluer certaines parties d’un examen. Par ailleurs, les adaptations formelles peuvent devenir des adaptations matérielles lorsqu’elles ont pour conséquence d’empêcher la vérification d’objectifs de formation ou d’examen ayant une portée centrale.

    C’est surtout lorsqu’on renonce à évaluer certaines prestations partielles dans le cas de difficultés d’apprentissage telles que la dyslexie et la dyscalculie, que des problèmes de délimitation peuvent se poser entre adaptations purement formelles et adaptations appartenant déjà à la catégorie « matérielle ».

    Ici aussi s’applique la règle selon laquelle le but fondamental de l’examen ou l’objectif d’apprentissage doivent être atteints pour que l’on puisse encore parler de compensation des désavantages. Pour les personnes présentant une dyslexie, renoncer (en partie) à évaluer l’orthographe ou l’expression écrite en français apparaît donc comme une mesure allant trop loin ; en revanche, dans la discipline « histoire », la même mesure peut encore être considérée comme une compensation proportionnelle des désavantages, car l’objectif fondamental de l’examen n’est pas de vérifier si l’élève emploie correctement la langue française mais s’il possède des connaissances suffisantes des contextes historiques.

    Comment et où déposer une demande de compensation des désavantages ?

    La demande de compensation de désavantages devrait être déposée auprès de l’institution de formation. Dans tous les cas, la requête doit être accompagnée du rapport d’un-e spécialiste (médecin, psychologue, logopédiste), mentionnant des mesures motivées médicalement ou psychologiquement pour compenser les désavantages. A côté du diagnostic précis et de ses conséquences sur l’enseignement ou les examens, il faudrait, selon le handicap, énumérer aussi les mesures nécessaires de manière aussi détaillée que possible. Ces mesures peuvent consister à rallonger la durée de l’examen, à permettre l’utilisation de moyens auxiliaires (ordinateur, programmes informatiques spéciaux (correction d’orthographe, synthèse vocale, etc.), calculatrices, etc.), adaptation de l’évaluation de la grammaire ou de l’orthographe, pauses plus longues, pondération plus forte des prestations orales ou écrites, etc. De manière générale, une demande de compensation des désavantages ne doit pas revêtir une forme particulière, mais les institutions de formation disposent de plus en plus souvent de notices et de modèles pour déposer une demande. Il est donc recommandé de s’adresser à l’institution concernée pour savoir s’il existe des impératifs en la matière.

    Tout accord sur la compensation des désavantages devrait s’effectuer sous forme écrite. Cette précaution assure une meilleure sécurité du droit et renforce le caractère contraignant des dispositions convenues pour toutes les parties. Cette accord devrait renfermer, outre les indications personnelles et des informations sur le handicap et ses effets, l’énumération des mesures convenues pour chaque discipline. La convention devrait également prévoir le contrôle régulier des mesures et la possibilité de les adapter s’il apparaît qu’elles ne mènent pas au but visé, qu’elles sont trop étroites ou trop larges ou encore si les effets du handicap se modifient.

    Comment et où peut-on se défendre contre un désavantage ?

    Dès le moment où le désavantage que fait subir l’institution de formation est connu, il faudrait prendre contact avec elle le plus rapidement possible, par ex. par l’intermédiaire des enseignants, des services de consultation de l’institution ou d’autres responsables. Les mesures censées éliminer les désavantages devraient si possible être définies en commun et en accord avec la personne concernée (ou ses parents) et avec les responsables de l’institution de formation.

    Par principe, les décisions d’institutions de formation qui concernent le droit à un accès sans discrimination à la formation et à la formation continue devraient être communiquées par écrit. Les institutions de formation publiques doivent, sur demande, émettre une décision susceptible de recours qui peut être contestée auprès de l’instance supérieure suivante. Si le recours est accepté, l’institution de formation publique peut être contrainte à éliminer les désavantages et à prendre des mesures positives. Contre les désavantages provenant d’institutions de formation privées, on ne peut obtenir du tribunal que la constatation de la discrimination et une indemnité d’un montant maximum de Fr. 5'000.-.

    Exemple

    Le jeune A. désire entreprendre un apprentissage professionnel. Pour entrer à l’école professionnelle, il doit passer un examen d’entrée. Comme il est dyslexique, il demande à l’école professionnelle une compensation du désavantage pour l’examen d’entrée. Le directeur de l’école lui communique par téléphone qu’il rejette sa requête. Comme A. n’est pas d’accord avec cette décision, il a le droit de demander une décision écrite contre laquelle il peut recourir auprès de l’instance supérieure suivante.

    Comme les procédures diffèrent beaucoup d’un canton à l’autre, il est recommandé de demander suffisamment tôt les conseils d’une étude d’avocats spécialiste du droit cantonal ou d’un service spécialisé compétent.

    Bases légales

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